VLC vs MPV : le match

Tester/utiliser MPV en gardant ses cheveux et sa sérénité ?

J'utilise VLC depuis qu'il existe. Au départ sur Windows, à présent sur Linux. J'en ai toujours été content… à une exception : il est développé en Qt. Et ça, pour un puriste de Gnome, c'est inconcevable. Il me faut du GTK… ou rien – même si la nouvelle génération d'applications sous la forme de paquets universels rend cette contrainte floue ou caduque.

Mais là, j'ai enfreint la première règle et je vis avec le poids de la culpabilité sur les épaules depuis tout ce temps.

Mais existe-t-il seulement un lecteur vidéo qui soit à la hauteur ?

Je suis tombé par hasard sur une vidéo YouTube qui mettait en avant les qualités de MPV.

Sur le papier, ça semble bien, ça semble beau… Mais qu'en est-il à l'usage, le mien ?

Premières impressions

Les plus…

3 lettres

MPV, de son petit nom, en 3 lettres seulement, tout comme VLC.

Si je remplace l'un par l'autre, ça ne me prendra pas plus de temps à lire son nom ou le prononcer. Une certaine symétrie est respectée.

Et j'aime la symétrie.

Ça se lance

Je lance donc une vidéo dans un format récent et… je n'ai aucun problème de lecture !

Ça peut paraître étonnant, mais le logiciel Vidéos fourni par défaut avec Ubuntu n'a jamais réussi à lire une seule vidéo – à se demander si son nom n'est pas usurpé. Il me demande à chaque fois d'installer un greffon… qui ne veut pas s'installer. Je supprime donc ce logiciel dès que j'en ai l'occasion.

Donc, oui, si ça se lance, c'est prometteur !

C'est rapide

Une des qualités ventées par les aficionados est la légèreté et la vélocité du logiciel.

Il est vrai qu'il est rapide, on ne peut pas le nier : il se lance en moins d'une seconde, même avec un fichier à lire sur le réseau, là où VLC en aura besoin de 4 ou 5.

Faut-il seulement ne rien avoir à se mettre d'autre sous la dent pour s'extasier devant un logiciel qui vous fera gagner 5 secondes au démarrage… lorsque vous devrez ensuite faire face à tout le reste ?

Il ne faut pas non plus s'empresser de comparer les vitesses brutes de lancement car certains logiciels sont sous le forme de paquets universils – snap, flatpack, … – contrairement à d'autres.

…et les moins

L'icône

L'icône de l'application est très moche. Les autres ont fait un effort minimal en rendant leur icône un peu jolie, étudiée, pensée…

Pourquoi les applications de geeks sont-elles toujours si facilement identifiables par leur cruel manque d'esthétique ?

L'icône est le premier contact avec une application : pensez au moins à donner envie de l'utiliser !

Je vais devoir la remplacer par une autre, je n'ai pas le choix.

L'interface indigente

L'icône était déjà un indice : MPV a une interface très austère. Si j'évite généralement les fioritures, MPV propose une interface tellement minimale qu'elle en devient minimaliste et difficilement pratiquable.

Si MPV est austère, c'est parce qu'il est pensé pour être multi-plateforme. Il ne fait qu'afficher la vidéo dans une fenêtre et c'est tout ! Cette dernière est gérée par le gestionnaire de fenêtres du système d'exploitation qui ajoute le pourtour, les icônes – agrandir, réduire, fermer. Si rien de plus n'est demandé, il n'affiche rien de plus. Toutes les autres options sont gérées directement au niveau de l'affichage vidéo lui-même, en surimpression, comme les vieux lecteurs DVD.

Du script et de la ligne de commande à gogo

Quand un geek, linuxien de surcroît, s'extasie devant un logiciel, je m'attends à de la ligne de commande et du script.

Ça ne râte pas : si MPV est tant apprécié, c'est parce que tout est configurable, par script ou ligne de commande. Mais, par défaut, il n'y a que le minimum, sans aucun effet esthétique. Même le lecteur vidéo YouTube est plus beau et plus agréable à utiliser.

Interface MPV

Les options et l'apparence sont configurées et configurables par des fichiers ou des paramètres. J'espère que vous aimez lire car, pour connaître et comprendre ces configurations, il faut lire la documentation… beaucoup de documentation… et en anglais.

De plus, comme il n'y a pas de menu accessible par la souris, il faudra retenir une longue liste de raccourcis pour accéder aux différentes options. Les interfaces graphiques ont été inventées justement pour ne pas avoir à apprendre et retenir les raccourcis clavier. Si vous comptiez installer le logiciel sur la machine de vos parents ou grands-parents et en faire des heureux, abandonnez l'idée.

Et les autres interfaces ?

Il existe d'autre interfaces comme SMPlayer ou Celluloid  – anciennement Gnome MPV – mais elles viennent s'ajouter à MPV, c'est-à-dire qu'après l'installation, il y a deux programmes disponibles dans les applications : le MPV original et le nouveau.

Je n'en voudrais qu'un seul. Juste un seul et unique, sans ambiguité. Je n'ai pas besoin de plus. Et comme MPV est matérialisé par une seule fenêtre pour afficher la vidéo, supprimer le programme correspondant revient à supprimer le logiciel en entier. Pourtant, Ubuntu Budgie propose Celluloid sans MPV; il est donc possible de supprimer le second pour ne laisser que le premier. En attendant de trouver comment, je dois me trimballer les deux – ou ne me contenter que de MPV. Vais-je devoir enfreindre la seconde règle ?

Celluloid commence mal. J'ai lancé deux vidéos, mises en pause tout juste après afin de comparer les options, de trouver les paramètres et comprendre les menus. Résultat : impossible de fermer la fenêtre. L'application a planté par deux fois. Deux vidéos, deux plantages. À part elle, les autres interfaces disponibles sont en Qt, même problème que VLC.

Pas le choix : soit il faut utiliser Celluloid, soit il faut utiliser MPV nativement – ou utiliser une interface KDE, mais cette option n'est pas envisageable.

Comme il n'y a pas de menu « Fichier > Ouvrir » en utilisation native, il y a 3 options pour lire un fichier :

  • Lancer MPV et glisser/déposer le fichier dans la fenêtre;
  • Clic-droit sur le fichier à lire et sélectionner «mpv»;
  • Lancer mpv en ligne de commande avec le fichier à lire en paramètre.

À ce niveau, je suis tellement horrifié que j'ai envie de m'enfuir à toutes jambes et revenir à mon bon vieux VLC.

Conclusion

C'est lorsqu'on est devant MPV qu'on se rappelle pourquoi on avait choisi VLC. Le premier est destiné à une élite – qui aime le rappeler –, le second au grand public.

Cependant, je n'ai pas dit mon dernier mot. C'est beau de critiquer, mais c'est aussi trop facile.

Le logiciel libre a cela pour lui qu'on peut l'adapter pour son propre usage. Et si je ne suis pas satisfait de MPV, alors je devrais pouvoir le changer.

Après tout, ne m'a-t-on pas vendu que la force du logiciel était d'être entièrement configurable ?

Je vais donc ouvrir la bête pour déterminer ce qu'elle a dans le ventre et faire au mieux pour l'intégrer dans mon système afin de voir si je peux aller aussi loin que VLC dans mes usages.

Au premier round, VLC a clairement l'avantage. Le seul point positif, même si MPV n'utilise pas GTK, il n'utilise pas non plus Qt, ce qui fait moins de bibliothèques à installer, à commencer par Qt, qui reste inutile.

Pour le reste… le match ne fait que commencer.

Comparatif

Vidéo par IP

Un de mes usages principaux avec VLC est la TV par IP, même si je suis peu consommateur de TV pure. Plus largement, tout ce qui est la consommation de vidéo par Internet, y compris YouTube.

Pour YouTube, VLC s'en sort haut la main là où MPV n'ouvre pas les liens pour une raison que j'ignore encore. Même si la recherche de la cause est en cours, cet échec démontre déjà que le logiciel n'est pas à la portée du premier venu. Cependant, la version installée sur Ubuntu Budgie fonctionne parfaitement, ce qui démontre que la problématique provient plus d'une mauvaise configuration que d'une incompatibilité technique.

Pour IPTV (rtsp, rtmp,…) les deux gèrent les flux. VLC est toutefois plus intuitif et agréable à utiliser puisqu'il suffit d'ouvrir le flux depuis « Média > Ouvrir un flux réseau… », là où MPV ne sait l'ouvrir que depuis une ligne de commande – ce qui n'est guère étonnant puisque MPV ne possède pas de menu du tout par défaut. Celluloid ne propose pas non plus cette option.

À noter que le logiciel Hypnotix proposant la lecture de flux IPTV sur un ordinateur – et fourni avec Linux Mint – repose sur MPV dont il peut être considéré comme un dérivé. Ce logiciel n'a que peu d'intérêt pour ceux qui utilisent VLC, excepté une interface différente et plus adaptée à une présentation moderne type TV ou tablette. Il suffit de récupérer la liste de lecture de Hypnotix pour la jouer sur VLC pour obtenir le même résultat.

Hypnotix

Remarque : Hypnotix n'est généralement pas disponible dans le dépôt standard Ubuntu. Un script d'installation est disponible ici pour réaliser simplement l'opération.

Envoi de flux à Google Chromecast

Ceux qui ont un Google Chromecast – ce qui est mon cas – apprécient particulièrement que VLC gère nativement l'envoi de flux audio et vidéo vers leurs appareils depuis le menu « Lecture > Rendu … ».

En ce qui concerne MPV, même s'il existe des demandes de la part des utilisateurs, il ne semblerait pas que l'option soit disponible nativement. Il faut passez par une solution externe nécessitant d'installer des composants ou des applications – serveurs – et requérant donc des connaissances techniques trop avancées pour un individu lambda ainsi que des composants douteux.

La radio

Certains sont consommateurs de radio par Internet sous la forme de flux. Ce n'est pas mon cas, mais c'est le pendant de la version vidéo. Les deux gèrent très bien les flux audio, MPV n'a simplement pas d'interface, il faut le lancer en ligne de commande.

Pour me faciliter la vie, j'ai développé un petit script Zenity pour rendre la gestion des radios plus aisée et plus jolie grâce à une interface.

Conversion

Si je suis grand utilisateur de VLC, c'est avant tout parce qu'il me servait de convertisseur/encodeur sous Windows.

J'ai donc appris à créer des tas de scripts pour convertir des tas de formats. Sous VLC, si les conversions se font en une ligne de script généralement, il est cependant possible de passer par l'interface graphique pour effectuer la même transformation.

Sous MPV, la conversion est possible mais un poil plus compliquée et nécessite généralement un script lua. Gstreamer et ffmpeg auront tôt fait de fournir le même résultat de façon équivalente et, parfois, plus simple. Il ne sert à rien de s'encombrer avec MPV pour cela, sauf dans de très rares cas.

Diffusion

De la même façon, VLC gère très bien la diffusion là où il ne me semble pas – pour l'instant dans l'état de mes tests – que MPV en soit capable, ou alors pas simplement.

CD audio (optionnel)

Les CD audio sont de moins en moins utilisés et, de plus, MPV est avant tout un logiciel de lecture vidéo – comme son nom l'indique. Il est donc inutile de comparer pleinement cette fonctionnalité. D'ailleurs il ne vaudrait mieux pas tellement les capacités sont indigentes. Les interfaces sont rares et la lecture devient donc native – comprendre : en ligne de commande –, là où VLC prend en charge les options habituelles d'un lecteur audio standard, à savoir une interface graphique avec raccourcis, présentation des pistes, …

Aujourd'hui, la plupart des distributions Linux possèdent leur lecteur audio spécifique également capable de lire les CD audio nativement et de façon plus conviviale. L'un comme l'autre ne sont pas nécessaires, sauf pour une personne désirant un seul lecteur pour tout gérer.

DVD (optionnel)

Même si j'ai des DVD, je les utilise peu car je préfère les sauver sous format ISO pour éviter les quelques désagrément dûs à leur obsolescence.

J'ai donc ressorti des DVD pour voir ce qu'il en était avec MPV et je n'ai pas réussi à en lire un seul. Aucune donnée audio ou vidéo.

C'est là que mes formats ISO ont servi. J'ai été capable de lire les fichiers en question, sans être capable de naviguer dans les menus ou même comprendre comment on pouvait effectuer l'opération là où elle est naturelle dans VLC, aussi bien en ISO qu'en DVD.

Synthèse

Nous pouvons rassembler les résultats dans le tableau suivant :

  VLC MPV Autre
YouTube OK ??  
IPTV OK OK Hypnotix
Google Chromecast OK X  
Radio OK OK  
Conversion OK ??  
Diffusion OK ??  
CD audio OK OK SMPlayer
DVD OK X  

Conclusion

MPV est très bon pour lire les vidéos, aussi bien locales que distantes, mais l'interface graphique lui fait cruellement défaut. Ses autres usages sont difficilement accessibles aux utilisateurs lambdas du fait de la nécessité de passer par des lignes de commande. L'outil reste élitiste, surtout conseillé pour les geeks qui ne jurent que par elle et qui veulent pouvoir l'intégrer dans un usage ad hoc. Les autres pourront passer leur chemin et chercher d'autres outils mieux adaptés.

Si votre objectif est de lire de simples vidéos, les intégrations comme Celluloid seront plus adaptées.

De son côté, VLC reste un très bon choix, tant par son interface claire et fonctionnelle que par la diversité de ses multiples capacités.